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23 décembre

Sauvetage du brick espagnol SAN GINES 

7 hommes sauvés

Participants au sauvetage

François Delpierre, Gabriel Huré et les équipages des bateaux de pêche JEUNE ALPHONSE et ABONDANCE

Dunkerque :

Le brick espagnol SAN GINES de Bilbao capitaine José Ascensio de Uribes est au nombre des navires qui ont été victimes de la tempête de ces derniers jours.

Voici les détails que le Commerce de Dunkerque, publie sur ce naufrage, qui a été signalé par les péripéties les plus émouvantes.

Ce navire, qui avait pris à Hambourg un chargement de blé en destination de Liverpool, a, dans la nuit du 23 de ce mois, vers deux heures du matin, touché sur le Tartel, banc qui se trouve à environ quatorze ou seize miles dans le Nord-Est du port de Dunkerque. Afin de relever le navire, le capitaine dut aussitôt jeter à la. mer une partie de son chargement. Voyant que cette manœuvre ne l’allégeait pas suffisamment, il fit monter sa chaloupe par trois hommes pour la tenir prête à sauver l’équipage du péril qui devenait à chaque instant plus imminent, et la fit amarrer au navire au moyen de deux bosses.

Les mats et les haubans de bâbord ayant ensuite été coupés sur l’ordre du capitaine, les mâtures tombèrent à tribord, et firent, par leur poids et la violence de leur chute, incliner complètement le navire de ce côté. Chacun dut songer alors à son propre salut, malheureusement, le canot, qu’un affreux coup de mer avait enlevé du navire, ne put, malgré les efforts des trois hommes qui le montaient, atteindre le bâtiment chaviré.

Le navire se trouvant presque entièrement submergé, le capitaine, homme courageux et énergique, s’empara d’une main de son jeune frère et du petit mousse, et de l’autre se tint cramponné aux débris flottants du navire. Il eut la force de les tenir dans cette position pendant près d’une heure, en essayant de les soulever chaque fois qu’une vague venait s’abattre sur eux. Mais les infortunés jeunes gens ne pouvant plus se maintenir et ayant d’ailleurs perdu tout sentiment, le capitaine dut, dans cet instant suprême, forcément lâcher prise, car une lame plus furieuse que les autres vint s’abattre sur eux et les séparer pour toujours.

Les naufragés restèrent ainsi suspendus sur l’abîme jusque vers sept heures du matin, lorsqu’après cinq heures de mortelles angoisses, ils furent aperçus par le bateau pécheur ABONDANCE de Dunkerque, patron Delpierre, qui parvint, non sans danger, car la mer continuait d’être furieuse, et le vent soufflait toujours avec violence, à accoster le navire coulé.


Le patron Delpierre rapporte que durant le sauvetage, le capitaine a été admirable de courage et de sang-froid. Le bateau pêcheur est entré dans le port à onze heure du matin, et bientôt après les naufragés eurent l’inexprimable bonheur d’embrasser leurs trois camarades qui avaient été enlevés du navire dans la chaloupe ; non moins providentiellement sauvés, ces derniers avaient été recueillis en mer par le patron Gabriel Hure, du bateau JEUNE ALPHONSE, qui est entré au port ayant l’heureuse chaloupe à sa remorque.

Ce terrible naufrage fera d’autant plus époque dans la vie du brave capitaine Ascensio de Uribes, que non seulement il a perdu son jeune frère, ainsi que nous l’avons dit, mais qu’il a encore eu la douleur de voir périr son beau-frère sans pouvoir lui porter aucun secours.

5 hommes de l’équipage du brick SAN GINES ont aussi péri, sans compter un sixième qui, en sortant de l’Elbe, étant tombé à l’eau, s’y est noyé. Immédiatement après leur débarquement, les naufragés ont été conduits chez M. Pierre Chamonin, vice-consul de Sardaigne et d’Espagne, qui leur a procuré aussitôt les secours les plus généreux.

(20) BNF Gallica Journal des débats politiques et littéraires

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